Bienvenue au pays des Bisounours.
Quand j'étais gamine mes parents m'avais acheté une cassette audio "Les plus belles chansons des Bisounours". Aujourd'hui encore mon père me parle avec "émotion" d'un trajet en voiture de Francfort à Quimper (1400 kilomètres) où j'avais exigé d'entendre non-stop cette cassette.
C'est vrai qu'il était beau ce pays des Bisounours... Il y avait Gro câlins, Gro gâteau et des tas d'autres Gro... quelque chose qui se promenaient tous les jours sur l'écran de la télé du salon. parfois ils parlaient en allemand, parfois en français, en anglais aussi pendant quelques temps... ça dépendait un peu de l'endroit où mon père travaillait.
Petit à petit quand même j'ai commencé à réaliser que je ne vivais pas dans ce pays des Bisounours, que mon monde à moi était un tout petit peu différent. La première gifle dans la cour de récréation du Kindergarten de Landau, la fille qui me tirait les cheveux à l'école de Chelmsford (Essex), la petite terreur qui voulait me racketter au lycée de Pont l'abbé, toutes ces petites anecdotes m'ont permis de réaliser que le monde n'est pas aussi beau que celui de l'écran de télé.
Bon, j'ai rendu la gifle, La robe de ma tireuse de cheveux était en lambeaux et ma racketteuse m'a laissé tranquille après que je lui ai planté ma fourchette dans la main à la cantine du lycée. Parce que même si j'aimais bien les Bisounours mon grand-père m'avait enseigné une règle importante de la vie en société :
" Un œil, les deux. Une dent, toute la gueule!"
Mon grand-père était un poète.
Je suis arrivée dans Second Life il y a déjà un certain temps, en 2006. malgré l'aspect "dessin animé" des personnages je savais que ce n'était pas le pays des Bisounours. Je savais que Second life est plein de personnes qui veulent vous gifler, vous tirer les cheveux ou vous racketter. Donc depuis 2006 j'applique les bonnes recettes de mon papounet, quand on m'agresse... Je cogne !
Depuis que mes avatars successifs se promènent dans Second life ils ont tout fait, tout et son contraire. Investissement dans l'immobilier, gros gains il faut le dire, boursicotage dans les banques SL en 2007 et récupération de tous mes bénéfices au bon moment c'est à dire juste avant que tout le système s'écroule. Je me suis même mariée et j'ai eu ici une vraie vie de femme au foyer, exactement ce que je ne suis pas dans RL.
Un beau jour du mois d'aout de l'année dernière, moi qui d'habitude évite soigneusement les sims francophones, je suis passée à la Rose. J'étais à la recherche d'une amie. Je n'ai pas trouvé l'amie mais ce jour là j'ai réussi à me crêper le chignon (gentiment) avec un membre du staff de la Rose qui venait de m'envoyer une invitation dans le groupe. Je n'accepte jamais les invitations dans les groupes. Nous avons pourtant continué notre discussion cette personne du staff et moi-même. Je ne savais pas que cette personne était une des propriétaires de la Rose. Je suis revenue le lendemain et une chose en entrainant une autre je suis passée doucement du stade de la cliente râleuse à celui de Directrice générale adjointe.
Petit à petit j'ai découvert la Rose.
On peut résumer la Rose en un seul mot : "Simple".
Les bâtiments, l'agencement, la décoration, Les activités et les gens qui viennent, tout peut peu être qualifié de simple.
Donc à la Rose il n'y a pas de rayon laser ni de lumière qui flashent dans tous les sens, pas de décor tarabiscoté, pas de mobilier high-tech, pas de pose-ball sophistiquée, pas de cérémonial ou de règles un peu neuneu pour les membres. Les quatre fondatrices de la Rose ont voulu les choses comme ça certainement pour bien marquer la différence avec tous les autres clubs de SL. Plutôt que d'alterner sans imagination une radio internet avec un ou deux DJ par jours, elles se sont données la peine de créer leur propre univers musical, des playlists "faites à la main" et qui varient assez souvent.
A la Rose vous pouvez entendre de la variété de toutes les époques, de la musique classique parfois (le dernier récital de Spirit a fait un tabac), il y a des représentations théâtrales, il y aussi des DJ qui passent. La ligne musicale évolue doucement en fonction des gouts de chacun des créateurs de playlists. C'est un peu plus rock depuis que je suis là, un peu plus international aussi.
Vous devez vous dire que la Rose est un endroit digne du pays des Bisounours, que c'est tout beau et tout mignon. C'est vrai que ça pourrait être comme ça, c'est vrai que ça pourrait être calme, cool, reposant, amical...
Malheureusement ce n'est pas tout à fait le cas.
On dirait que les endroits calmes et simples attirent les emmerdeurs comme le miel attire les mouches. On dirait que le fait que des gens cherchent à passer un moment agréable attire les perturbateurs. On dirait qu'une certaine réussite provoque immanquablement chez certains un profond désir de tout flanquer par terre.
Alors pour ces gens là tous les moyens sont bons.
Depuis des mois un type passe régulièrement, il insulte les danseurs, il critique la musique, la décoration, L'habillement des autres. Tout est matière à critiques et si vous dites quelques chose il se drape dans sa dignité de grand démocrate dont les droits imprescriptibles de faire chier le monde sont bafoués par une "salope de lesbienne fasciste"( la lesbienne fasciste c'est moi). Je lui ai demandé un jour de me définir ce qu'était le fascisme, je vous donne la réponse dans son jus : "Ben le fascisme c'est les fachos comme toi...". Dommage que mon prof de philo du lycée n'ai pas été là il aurait caressé doucement sa barbichette et sorti une phrase du style: " Certes mon cher, je n'en disconvient point. Néanmoins, dans l'intérêt de la raison, vous serait-il possible d'argumenter plus avant ?" Mon prof de philo avait un talent reconnu pour mettre les gens en boite.
Il existe plusieurs groupes qui se sont fait une spécialité de faire crasher les sims. Ils arrivent sur place, insultent un peu tout le monde et comme les gens insultés répondent ils se vengent de cet affront impardonnable en faisant crasher les avatars ou la sim entière s'il le peuvent. C'est surement très amusant, cette démonstration de leur "puissance" doit provoquer chez eux une petite bouffée de jouissance... On a les jouissances que l'on peut.
Enfin, il faut jamais négliger que Second Life est un univers basé sur des principes marchands très simple. Le but est de faire marcher la planche à billets. Le Linden dollars doit circuler, les marchands doivent vendre, les acheteurs acheter et Linden Lab doit prélever sa dime sur tout. Alors il existe une concurrence féroce entre tous les créateurs de richesse, il faut attirer chez soi un maximum de monde pour rentabiliser ses investissements et payer les droits à Linden Lab. Alors si les "clients" sont chez un concurent quoi de plus simple que d'aller les piquer sur place. Certains soirs nous constatons de véritables évaporations en masse des gens qui passent chez nous. Ils atterrissent au point d'arrivée normal et sur le chemin qui va de ce point à la Rose... ils disparaissent. Très curieusement nous avons constaté qu'il suffit de déplacer périodiquement et aléatoirement le point d'arrivée pour que tout le monde, sans exception, réussisse à arriver jusqu'à la Rose. Disons que c'est un des grands mystères de Second Life... A moins qu'il ne s'agisse d'une recette vieille comme SL qui consiste à envoyer un TP à quelqu'un en fonction des renseignement donnés par une personne qui note toutes les arrivées.
La liste des chausse-trappes, vacheries et petites méchancetés de tous les jours pourrait remplir des pages entières de ce blog. Je sens d'ailleurs que je vais me faire un plaisir de vous en parler périodiquement.
Malgré tout ça et peut-être justement grâce à tout ça, la Rose continue d'être un endroit que nous voulons faire vivre, un endroit que nous voulons développer, un endroit que nous voulons faire évoluer.
Chaque problème que nous rencontrons est une raison supplémentaire pour nous de continuer. On peut même dire que chaque agression est une chance qui nous est donnée de faire mieux qu'avant, un stimuli supplémentaire qui nous pousse à bouger, à évoluer, à aller de l'avant.
"Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort." Nietzche.
Claude Neiro.